Gènes de Réparation de l’ADN et Leur Implication en Cancérogenèse

 La stabilité génétique d’une cellule repose sur la capacité de son génome à résister et à corriger les dommages induits par des facteurs endogènes (radicaux libres, erreurs de réplication) et exogènes (UV, rayonnements ionisants, agents chimiques). Les cellules disposent de systèmes sophistiqués de réparation de l’ADN qui assurent la préservation de l’intégrité génomique. Lorsque ces mécanismes échouent, des mutations s’accumulent, favorisant la transformation cellulaire et la progression vers un cancer.


I. Sources des dommages à l’ADN

L’ADN est continuellement agressé, avec environ 10⁴ à 10⁵ lésions par cellule et par jour. Parmi les principales causes :

  • Agents physiques : rayonnements UV provoquant des dimères de pyrimidine, rayons X entraînant des cassures double brin.

  • Agents chimiques : alkylants, radicaux libres, toxines environnementales.

  • Causes endogènes : erreurs de réplication de l’ADN, désamination spontanée des bases, stress oxydatif mitochondrial.


II. Principaux mécanismes de réparation de l’ADN

  1. Réparation par excision de bases (BER – Base Excision Repair)

    • Corrige les lésions mineures comme les bases oxydées ou désaminées.

    • Impliquant des enzymes comme les glycosylases, l’AP endonucléase et l’ADN polymérase β.

  2. Réparation par excision de nucléotides (NER – Nucleotide Excision Repair)

    • Élimine des lésions volumineuses comme les dimères de thymine causés par les UV.

    • Gènes clés : XPA à XPG. Leur mutation est responsable du xeroderma pigmentosum, caractérisé par une hypersensibilité aux UV et un risque élevé de cancers cutanés.

  3. Réparation des mésappariements (MMR – Mismatch Repair)

    • Corrige les erreurs de réplication (insertion, délétion, mésappariement de bases).

    • Gènes impliqués : MLH1, MSH2, MSH6, PMS2. Leur mutation entraîne le syndrome de Lynch, prédisposant au cancer colorectal et à d’autres tumeurs.

  4. Réparation des cassures double brin de l’ADN

    • Recombinaison homologue (HR) : mécanisme fidèle utilisant une séquence sœur comme modèle.

      • Gènes : BRCA1, BRCA2, RAD51.

    • Jonction d’extrémités non homologues (NHEJ) : réparation rapide mais sujette à erreurs.

      • Gènes : KU70, KU80, DNA-PKcs.


III. Lien entre défauts de réparation de l’ADN et cancer

  1. Mutations germinales

    • Mutations héritées dans les gènes de réparation augmentent la susceptibilité aux cancers.

    • Exemples :

      • BRCA1/2 → cancer du sein et de l’ovaire.

      • MLH1/MSH2 → syndrome de Lynch.

      • XPA-XPG → xeroderma pigmentosum.

  2. Mutations somatiques

    • Perte de fonction de gènes de réparation dans des cellules somatiques favorise l’instabilité génomique et l’accumulation de mutations oncogéniques.

  3. Altérations épigénétiques

    • La méthylation du promoteur de MLH1, par exemple, conduit à une perte d’expression du gène et à un défaut de MMR.


IV. Implications thérapeutiques

  1. Stratégies de dépistage et diagnostic

    • Tests génétiques pour BRCA1/2 ou MMR utilisés pour évaluer le risque familial.

  2. Ciblage thérapeutique des déficits de réparation

    • Inhibiteurs de PARP (Poly ADP-ribose polymérase) : exploitent la vulnérabilité des cellules déficientes en HR (ex. cancers BRCA-mutés).

    • Thérapies combinées : association radiothérapie/chimiothérapie avec inhibiteurs de réparation pour augmenter la sensibilité des cellules tumorales.

  3. Médecine personnalisée

    • Le profil de réparation de l’ADN est désormais un biomarqueur clé pour choisir les traitements.


Conclusion

Les gènes de réparation de l’ADN constituent des gardiens de l’intégrité du génome. Leur défaillance est au cœur de l’instabilité génomique et de la cancérogenèse. L’étude de ces voies a permis des avancées majeures en oncologie moléculaire, ouvrant la voie à des thérapies ciblées comme les inhibiteurs de PARP et à une approche de médecine de précision.

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