Le développement du cancer repose sur un déséquilibre entre des gènes qui stimulent la prolifération cellulaire et d’autres qui la freinent. Parmi ces acteurs clés, on distingue deux catégories principales : les oncogènes et les gènes suppresseurs de tumeurs. Leur interaction et leurs altérations génétiques sont au cœur de la tumorigenèse.
1. Qu’est-ce qu’un oncogène ?
Un oncogène est un gène dont l’activation anormale favorise la prolifération et la survie des cellules.
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Proto-oncogènes : à l’état normal, ce sont des gènes essentiels au contrôle de la croissance, de la différenciation et de la signalisation intracellulaire.
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Mutation → oncogène : une mutation ponctuelle, une amplification génique ou une translocation chromosomique peut transformer un proto-oncogène en oncogène, entraînant une activation constitutive.
🔬 Exemples d’oncogènes :
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RAS : impliqué dans la signalisation MAPK et PI3K/AKT, souvent muté dans les cancers du poumon et du pancréas.
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MYC : facteur de transcription régulant la croissance cellulaire.
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HER2/ERBB2 : récepteur tyrosine kinase amplifié dans certains cancers du sein.
2. Qu’est-ce qu’un gène suppresseur de tumeurs ?
Les gènes suppresseurs de tumeurs agissent comme des freins de la division cellulaire ou comme gardiens de l’intégrité génomique. Leur perte de fonction conduit à une levée de contrôle et favorise la progression tumorale.
🔬 Exemples de gènes suppresseurs :
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TP53 : surnommé le “gardien du génome”, il induit l’arrêt du cycle cellulaire ou l’apoptose en cas de dommages à l’ADN.
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RB1 : contrôle le point de restriction G1/S du cycle cellulaire.
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BRCA1/2 : impliqués dans la réparation de l’ADN par recombinaison homologue.
📌 Contrairement aux oncogènes (effet dominant d’une seule mutation), les gènes suppresseurs suivent souvent le principe des “deux coups” de Knudson : les deux allèles doivent être inactivés pour perdre totalement la fonction.
3. Oncogènes vs gènes suppresseurs : une opposition complémentaire
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Oncogènes = accélérateurs bloqués en position “ON”.
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Gènes suppresseurs = freins endommagés ou absents.
Le cancer survient souvent lorsque les deux types d’altérations coexistent dans la même cellule : activation des oncogènes + inactivation des gènes suppresseurs.
4. Implications en cancérologie et en thérapie ciblée
La compréhension de ces gènes a ouvert la voie aux thérapies ciblées :
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Inhibiteurs de kinases (ex. inhibiteurs de BCR-ABL dans la leucémie myéloïde chronique).
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Anticorps monoclonaux (ex. trastuzumab contre HER2).
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Réactivation pharmacologique de TP53 ou exploitation des vulnérabilités liées à BRCA1/2 (inhibiteurs de PARP).
Ces approches marquent un tournant dans l’oncologie de précision, où les profils génétiques des tumeurs guident les choix thérapeutiques.
Conclusion
Les oncogènes et les gènes suppresseurs de tumeurs représentent deux faces complémentaires du contrôle cellulaire. Leur dérégulation transforme une cellule normale en cellule cancéreuse. Comprendre ces mécanismes permet non seulement d’expliquer la biologie des cancers, mais aussi de développer de nouvelles stratégies thérapeutiques, de plus en plus personnalisées.